Alain Martineau, patron du groupe GMD, avait posé comme première condition au dépôt d'une offre de reprise de GM&S, le règlement de la question immobilière. Les 25.000 euros de loyers par mois payés par la société GM&S à une SCI détenue par ses anciens propriétaires (les patrons d'Altia) plombent ses résultats depuis 2009.
Le jackpot des actionnaires d'Altia
Comme l'a rappelé et détaillé une enquête publiée par le site Médiapart, les trois dirigeants du groupe Altia font depuis 2014 l'objet de poursuites pour abus de biens sociaux et escroquerie. L'immobilier est l'un des volets de ce « pillage » présumé. Selon Mediapart, la holding de tête d'Altia aurait payé les murs du site de La Souterraine 250.000 euros. A raison de 25.000 euros de loyers par mois, et sans chantier de rénovation d'envergure ( les bâtiments datent des années 1960), en huit ans, le retour sur investissement est exceptionnel. Et cette même SCI n'entend pas renoncer à ce jackpot. Les salariés de GM&S ont été scandalisés cette semaine en apprenant que l'administrateur judiciaire avait versé « 150.000 euros à la SCI pour les loyers impayés depuis le début du redressement judiciaire en septembre. Cet argent a été prélevé sur les fonds versés par la région Nouvelle Aquitaine pour payer les salaires", croit savoir Jean-Marc Ducourtioux, représentant du personnel CGT.
En toute logique, le PDG de GMD ne veut pas à son tour jouer les pigeons. La cellule de crise dédiée à GM&S et mise en place par le Président de la République, a trouvé une solution : le rachat du site par une collectivité locale. Le prix demandé par les actuels propriétaires serait d'1 million d'euros, ce qui augure encore d'une belle plus value pour la SCI.
Etienne Lejeune, président de la communauté de communes de l'ouest creusois, a fait état de « pressions » venues d'en haut pour que son intercommunalité, qui a compétence sur l'immobilier industriel , rachète le site sur le champ.
Le repreneur table sur un loyer mensuel de 15.000 euros
Elément tangible, le repreneur, Alain Martineau, a déclaré à France Bleu Creuse, qu'il était prêt à payer « un loyer de 15.000 euros ».
Etienne Lejeune est loin d'opposer une fin de non-recevoir à ces projections mais il veut garder la tête froide : « Nous n'avons pris aucun engagement pour la bonne raison que le conseil communautaire n'a pas été saisi du sujet. On nous dit d'aller très vite, ok, mais on n'engage pas de l'argent public n'importe comment ».
« Il faut à minima que le site soit évalué par des experts, il y a de lourds investissements de rénovation et de mise aux normes à réaliser. Et le prix doit être négocié »
L'achat du site GM&S n'est pas à l'ordre du jour du conseil communautaire qui se tient ce vendredi soir à La Souterraine, mais son président assure qu'il lancera un débat : « Il faut à minima que le site soit évalué par des experts, il y a de lourds investissements de rénovation et de mise aux normes à réaliser. Et le prix doit être négocié ».
Autre condition posée par Alain Martineau : la dépollution du site. « Elle pourrait être prise en charge par l'Etat », croit savoir Etienne Lejeune.
L'élu de La Souterraine sait déjà qu'il va être interpellé par les conseillers communautaires sur une question de bon sens : « Peut-on contracter un emprunt pour racheter un site industriel si nous n'avons pas en face de garantie sur la pérennisation de l'activité ? ».
Les élus locaux écoutent les salariés de GM&S qui estiment que, dans les conditions actuelles de la reprise, l'espérance de vie de l'usine n'est que de deux ans.
Le bassin de La Souterraine peut-il prendre le risque de rembourser durant vingt ans l'achat d'une friche industrielle ? A fortiori s'il est fragilisé par disparition de son plus gros employeur privé .
Julien Rapegno